“ L’égalité des chances ”, de Charybde en Scylla ?

Article publié par le Journal du droit des jeunes - Revue d’action juridique et sociale, Dossier "Egalité et discriminations", n° 257, sept. 2006
vendredi 27 octobre 2006 par Gilles J. Guglielmi

L’égalité des chances n’est nullement une notion juridique, même si elle a été récemment érigée en objectif par la loi du 11 février 2005 (art. 19) et en cadre d’action par la loi du 23 avril 2005 pour l’avenir de l’école (art. 2).

L’expression « égalité des chances » a été utilisée par la sociologie de l’éducation dans les années 1960. Bien qu’elle ne soit pas le volet positif de « l’inégalité des chances » que Raymond Boudon pouvait relever à travers les cursus scolaires entre les enfants provenant de classes aisées et les enfants des classes défavorisées, elle posait clairement la question de savoir si l’école contribuait ou non à égaliser les chances d’accès à une carrière correspondant au talent ou à la vocation de chacun, si, ainsi, elle atténuait ou maintenait les inégalités.
Mais depuis les années 1980, l’expression « égalité des chances » a retrouvé son inspiration libérale originelle pour tendre à remplacer dans les discours politiques, et parfois dans les normes elles-mêmes, le mot égalité. Le Conseil d’Etat invitait ainsi dans son rapport de 1996 à s’interroger « sur la portée d’une égalité conçue comme une égalité des droits » et à rechercher si « une meilleure égalité des chances n’apporterait pas aux problèmes économiques et sociaux de la société contemporaine une réponse plus équitable ».

Pourtant l’égalité des chances n’est nullement une notion juridique, même si elle a été récemment érigée en objectif par la loi du 11 février 2005 (art. 19) et en cadre d’action par la loi du 23 avril 2005 pour l’avenir de l’école (art. 2). Comme l’indiquent ses termes constitutifs, elle ne vise ni à l’égalité des résultat finaux ni à l’égalité des conditions initiales. A l’école, où l’égalité des chances relève parfois du mythe, elle en vient à désigner implicitement l’égalité tout court. Or, au contraire, l’« égalité des chances » au départ permet le plus souvent de justifier l’écart des résultats à l’arrivée, et de légitimer au bout du compte, des inégalités bien réelles.


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EGALITEDESCHANCES

30 octobre 2006
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