Le juge administratif est le juge naturel des travaux des enseignants-chercheurs
La 1ère chambre civile de la Cour de cassation porte un coup d’arrêt à l’utilisation de l’action en diffamation pour tenter de réduire la libre expression des enseignants-chercheurs dans leurs travaux de recherche.
La Cour de cassation a rendu, par un arrêt de sa 1ère chambre civile, ce 23 février 2011 (pourvoi n° M 09-72.059), une décision sur la compétence de la juridiction judiciaire que l’on peut qualifier de déterminante à la fois pour l’ensemble de l’Université française, son rayonnement et les hommes et femmes qui s’y dévouent.
Madame Hélène Maurel-Indart, enseignant-chercheur en littérature française, a publié en 2007 aux éditions La Différence, son mémoire d’habilitation à diriger des recherches (HDR), soutenu en décembre 2005 à l’université Paris IV-Sorbonne. Elle a alors été assignée en diffamation devant le tribunal de grande instance de Paris par un avocat, auteur d’un ouvrage dont des extraits avaient servi de base aux démonstrations de la thèse. La question de savoir si cette diffamation est avérée n’a pas été jugée et ne retiendra donc pas l’attention. Plus profondément, le problème majeur posé par les décisions du TGI de Paris et de la Cour d’appel de Paris, et réglé par la Cour de cassation est celui de la compétence du juge judiciaire.
Cette question de compétence est absolument vitale pour l’Université et la liberté d’expression des enseignants-chercheurs. Tous les juristes informés s’accordent à dire en effet que les actions en diffamation tendent à constituer depuis quelques années un moyen de pression sur diverses professions amenées, par définition, à faire usage de leur liberté d’expression en public : hommes politiques, humoristes, journalistes, universitaires.
La 1ère chambre civile de la Cour de cassation a très fermement donné un coup d’arrêt à ces tentations, auxquelles avaient succombé des juges du fond pourtant expérimentés, en ce qui concerne les enseignants-chercheurs. Pour la juridiction suprême de l’ordre judiciaire, « quel qu’en soit le support, la publication d’un ouvrage, qui est le résultat de recherches universitaires, entre dans la mission du service public de l’enseignement supérieur et relève des fonctions des enseignants-chercheurs qui s’exercent dans le domaine de la diffusion des connaissances ». Par suite, la juridiction judiciaire ne saurait en connaître.
La suite et l’arrêt sont à paraître dans l’Actualité juridique Droit administratif (AJDA).
fr Droit du service public L’Université est aussi un service public ? | OPML ?